par torrance' sur 04 Mar 2004 23:39
Après la discothèque idéale qui continue à fleurir, je souhaitais ouvrir un topic sur le cinéma, quelque chose de plus large que de simples topics sur un film...
Voilà donc la DVDthèque idéale, un topic dans lequel chacun pourra venir parler des films indispensables, ceux à avoir en DVD, à voir et revoir, ceux ayant eu une influence majeure dans votre vie, ceux vous remettant en mémoire des souvenirs et émotions fortes.
Un topic large, donc, où vous pourrez enfin faire des reviews complètes de vos films marquants (et ce, qu'ils aient été ou non édités en DVD bien sûr !).
Alors je vais commencer avec un film qui vient juste de sortir en DVD, un film somme comme on n'en fait plus aujourd'hui, un de ces films qui aura marqué le cinéma, et accessoirement, ma petite vie...
[b]IL ETAIT UNE FOIS EN AMERIQUE[/b]
1984
De Sergio LEONE
Avec Robert DE NIRO, James WOODS.......
Musique de Ennio MORRICONE
[img]http://images-eu.amazon.com/images/P/B000092T6K.01.LZZZZZZZ.jpg[/img]
J'attendais avec plus qu'impatience la sortie en DVD de "Il était une fois en Amérique" car ma VHS commençait à dépérir à force de la passer en boucle...
Voilà un des quelques films qui auront marqué mon enfance, et ce, grâce à mon cher père, que je ne remercierai jamais assez pour m'avoir fait découvrir quelques uns de ces films monumentaux qu'il aime tant...
En dépit de la violence picturale, morale, psychologique de ce film, mais aussi de la complexité de ses thèmes et de sa narration, je me souviens avoir vu ce film vers mes 10 ans, mon père à côté, m'expliquant que la vie pouvait parfois être aussi cruelle, aussi dure et sale que le montrait Leone.
Ce genre d'expérience forge un petit garçon et apprend aussi la curiosité. Alors que mes camarades de classes kiffaient "Un flic à la maternelle", je rêvassais en classe en pensant à ce film dantesque qui m'aura définitivement "traumatisé"...
La beauté du cadre et son importance, le langage cinématographique et musical, "Il était une fois en Amérique" aura fait partie de ces films qui auront forgé mon envie d'écrire et surtout, mon envie de découverte.
Je l'ai revu hier soir, après 4 ou 5 ans d'abscence dans ma vie..
Et je ne peux que conseiller vivement à ceux qui ne l'ont jamais vu de se l'acheter dans la minute après avoir lu ce post.
"... en Amérique" est le dernier film de Leone, et aussi, sans doute, l'un des derniers chef d'oeuvre à l'ancienne du cinéma.
Cinéma d'un autre temps, où l'on prenait son temps pour raconter une histoire, où les cadrages en disaient autant (parfois plus) que les dialogues, où chaque élément visuel (décors et costumes grandioses et minutieux, photographie, montage...) prenait sa place dans l'édifice, "... en Amérique" nous fait une démonstration de classe, d'intelligence, de beauté, de mélancolie, de dureté... Une leçon de cinéma tout autant qu'une leçon de vie.
Ce film est touchant par la multitude des thèmes abordés, se rejoignant en une grande idée : la vie d'un petit gangster, Noodles (De Niro) et de ses accolytes, des années 20 à la fin des années 60. Noodles, tout au long de sa vie, devra faire des choix et ira sur la voie de l'amitié indestructible plutôt que sur celle du pouvoir omniscient et de l'argent. Noodles est un looser, comme il le dit lui même, et c'est son histoire qui est racontée ici.
Faites de trahisons, de coups bas, de violence, d'amours ratées, de sacrifices idiots et de fuites, l'histoire de Noodles dénote de celle du héros traditionnel. Car Noodles, n'est pas un héros et il y a fort à parier qu'il aura inspiré à Scorsese ses personnages des "Affranchis" et de "Casino".
Raconter "Il était une fois en Amérique" est impossible, tout simplement car ce film de 3h40 est une saga complexe, que chacun appréhendera à sa manière, particulièrement la fin, tout en nuances et douceur, dans laquelle le spectateur pourra trouver SA fin...
Et puis, il y a cette complexité de montage, par laquelle Leone se permet toutes les libertés. Mélangeant présent et passé, passant de l'un à l'autre de façon abrupte pour mieux nous intriguer, Leone construit une narration parfaite, envoûtante, mystérieuse, dans laquelle les personnages prennent forme pas à pas, 3h40 durant. Rien n'est jamais définitif, car rien n'est jamais totalement exposé... Brillant.
La classe de la réalisation en dit long aussi sur la maestria de ce bijou. Le premier quart d'heure, et notamment cette scène où une sonnerie de téléphone intemporelle vient déchirer les images pendant de longues minutes, jusqu'à ce qu'on comprenne d'où elle vient, de quel temps... magnifique...
Ce film est pétri de scènes magiques et marquantes. En le revoyant, je me suis rendu compte à quel point mes 10 ans étaient encore bien en moi, comme si ce film, et certains de ses moments, ne m'avaient jamais quitté... Patsy dans les escaliers avec sa charlotte russe, Cockeye et sa flute de pan, les cinq gamins marchant joyeusement avec le pont de Brooklyn en fond, la petite Deborah (Jennifer Connelly) dansant avec malice dans l'arrière salle du restaurant...
Mais aussi des scènes d'une violence inouie, tant par la crudité visuelle que par la force psychologique qu'elles mettent en avant...
La musique d'Ennio Morricone, toujours aussi profonde et viscérale, réserves des moments sublimes, qui auront donné au film son identité visuelle, la quasi totalité de la partition ayant été composée avant le tournage et ayant été joué sur le plateau pour inspirer les comédiens... Une BO rare et intense, d'une gravité et d'une nostalgie qui me tire encore des larmes aujourd'hui...
Si vous ne l'avez pas compris, "Il était une fois en Amérique" est LE DVD à acheter en ce moment... (avec "Il était une fois dans l'ouest", évidemment !).
Tout ici confine au génie, y compris des acteurs qui s'effacent avec talent derrière leurs personnages pour ne laisser voir que leurs blessures, leurs fragilités, leurs vides.
Un bijou de 3h40, interrompu d'un entracte. Malheureusement, l'éditeur n'a pas respecté l'entracte choisi par Leone et a préféré couper le film en deux parties quasi égales (1h55-1h40) alors que l'entracte intervient normalement à 2h25... Seul défaut majeur de ce DVD...
Car l'image est d'une beauté hallucinante et je n'avais jamais vu ce film dans d'aussi bonne condition..; Quant au son, remasterisé en 5.1, il est remarquablement bien spatialisé et d'une pureté rendant furieusement hommage à la musique de Morricone. Un must, donc.
A vous procurer d'urgence... !!
P.S : à l'époque, aux USA, sous la pression de distributeurs idiots, le film était sorti dans une version linéaire de deux heures qui est à fuir si vous l'avez en VHS... Ne regardez que la version de 3h40 qui est LA version voulue par Leone.
P.S 2 : très peu de bonus ici mais juste un petit documentaire de 20 mn sur Leone et son oeuvre. 20 mn intenses et très intéressantes. Mais le film n'a pas besoin de bonus, tant il est une aventure humaine et artistique remarquable.
Régalez-vous ! Si vous ne l'avez jamais vu, j'envie le choc que vous allez avoir, la découverte de ce film étant une expérience magnifique d'intensité.
"Mozart, Bach, Beethoven, je vous signale que je les ai tous coiffés au poteau. J'ai écrit 5500 chansons, moi !" James Brown
Edité par - torrance le 04/10/2003 18:10:46