[b]Posté - 13/03/2002 : [/b] Et voilà, comme dit (même si ce n'est pas tout à fait dans les délais annoncés: c'est que ma vision du temps n'est pas très occidentale, on va le dire comme ça!) je rouvre successivement mes différentes boutiques, et donc ce soir, je relève le rideau de ma chère échoppe du "Mais kèskya dans l'éprouvette?"! Ca va, ça ne sent pas trop le renfermé? Aérons tout ça, par exemple avec un bon bol d'air océanique, apporté par le sujet proposé: les variations climatiques et l'ère glaciaire en Europe, ou comment organiser de JO d'hiver en Espagne.
Je ne sais pas si ce sujet va soulever de grandes discussions, car je m'aperçois qu'il est loin d'être aussi polémique que le précédent, mais essayons:
Prenons les choses bien en arrière: au départ, alors que les terres n'étaient pas encore séparées en continents distincts, elles étaient concentrées dans la zone tropicale, le reste étant occuppé par l'océan. Ces eaux étaient donc libres aux pôles, et non coincées entre des masses océaniques qui entravaient leur circulation et favorisaient le développement de la glace. Le climat était donc bien plus homogène à la surface de la Terre: pas de calottes glaciaires, une amplitude des températures aquatiques certainement relativement faible, donc peu d'influences contrastées sur les courants atmosphériques qui de même que les eaux ne sont pas entravés par les continents ne sont paas non plus gênés par les montagnes (les géologues vous le diront: les grandes chaînes actuelles n'étaient pas encore formées), et donc un climat aussi beaucoup plus homogène sur l'ensemble de la planète. Et la conséquence en est une végétation qui se développe à la faveur de ce climat clément en une vaste forêt, la forêt tertiaire. Voilà la situation de départ.
Mais voilà, une masse terrestre concentrée dans la zone équatoriale est soumise au maximum de la force de rotation terrestre, et la conséquence inéluctable en est l'éclatement et la dérive des morceaux ainsi détachés qui commencent à former des continents. Puis aux détours de ces vagabondages, certaines plaques contientales se rencontrent, soulevant les montagnes. Je sais, cela ressemble à la musique ennuyeuse des cours de géographie physqiue du collège, mais cela a son importance parce que sans montagnes, le climat serait très différent, je fais vite, promis. Conséquences: une grosse masse continentale au pôle sud concentre une masse de glace, de même les eaux du pôle nord coincées entre les terres constituent une seconde calotte glaciaire. Les masses d'eau et d'air se retrouvent canalisées par les continents et les montagnes, contraintes de suivre des courants définis. Tout cela entraîne la mise en place de climats et de saisons différenciés. Certaines zones reçoivent plus de précipitations et / ou plus de courants chauds que d'autres. Et n'oublions pas que la formation de calottes glaciaires a emprisonné une quantité d'eau énorme qui est soustraite aux échanges climatique, ce qui signifie que les précipitations deviennent aussi moins abondantes, ce qui contribue encore au développement des zones herbeuses au détriment de la forêt. Et la végétation se répartit également par zones climatiques, à tendance herbeuse ou forestière, en fonction de ces deux paramètres.
Ces changements entrainèrent aussi au passage la disparition de certaines formes de vie et le développement d'autres. C'est la grande extinction de la fin de l'ère tertiaire.
C'est alors que surgit la chaîne des volcans de Mésoamérique, qui relie l'Amérique du nord et l'Amérique du sud, jusque là séparées, et ferme l'isthme de Panama, contraignant les courants marins à se modifier une nouvelle fois. Le Gulf Stream se mit alors en place (celui dont dépendent les anticyclones et les dépressions que nous guettons sur la carte de Météo France!): l'eau chauffée à l'équateur redescend vers les Tropiques, mais elle es coincée par l'isthme de Panama, elle ne peut pas continuer vers le Pacifique, alors elle remonte vers le nord, au niveau de Terre-Neuve elle est à nouveau bloquée par le relief sous-marin et l'eau froide descendant du pôle, elle bifurque donc vers l'est, mouvement favorisé par celui de la rotation de la Terre. Parallèlement, les eaux froides du nord se réchauffèrent au contact du Gulf Stream et la formation des glaces polaires s'inversa, les glaces se mirent à fondre. Le même phénomène se produisit bien entendu dans l'hémisphère sud, mais l'espace de l'Atlantique sud étant plus dégagé que l'Atlantique nord, et surtout la calotte étant supportée par un continent et non par une mer, il y fut de moindre ampleur: courant plus faible et fonte de la calotte antarctique plus modérée. Bref la température et les précipitations remontèrent un peu, et la forêt reprit un peu de vigueur. Mais la grande extinction de la fin de l'ère tertiaire se poursuit: la forêt est revenue trop tard, et pas assez fort, et puis certaines zones ont épuisé à force de chaleur et de sécheresse leurs ressources naturelles permettant la vie de nombreuses espèces, c'est le cas de l'Amérique du sud et de l'Australie, en revanche l'Afrique bénéficie de l'ouverture du rift qui amène des ressources, combinées à l'amélioration climatique, et c'est une explosion de vies, parmi lesquelles certains êtres encore discrets, nos amis les humanoïdes...
Mais revenons à nos moutons (ou à leurs ancêtres, pas très heureux d'ailleurs du retour de la forêt!). Le retour de ces précipitations sur les latitudes tempérées et le retour de la végétation réduisirent les écarts de température entre les différentes latitudes, et les mouvements d'air et d'eau ralentirent un peu, les échangent de chaleur aussi. La neige s'et mise à subsister de plus en plus longtemps dans les hautes latitudes... L'accumulation de neige dans l'Himalaya affaiblit progressivement la mousson (en immobilisant l'eau) et donc l'apport de chaleur vers le nord du continent. Côté Atlantique, plus de précipitations au nord, c'est aussi un apport d'eau tiède et douce dans l'Atlantique nord, terrain de jeu du Gulf Stream, de plus il est affaibli par le ralentissement des échanges de température: il dévie alors légèrement vers le Portugal, montant moins haut vers le nord, et transportant moins d'eau chaude, au nord où la température rafraîchit d'autant, favorisant la persistance de la neige. La glaciation est un phénomène en spirale, qui s'amplifie de lui-même.
Voilà comment a commencé le cycle des glaciations.
Le développement de l'ère glaciaire immobilise une énorme quantité d'eau aux pôles et dans les glaciers, faisant baisser le niveau de la mer d'environ 120m, moins d'eau c'est moins de précipitations, moins de neige c'est le sol non protégé qui gèle en profondeur, et la végétation qui abandonne, et donc l'envahissement de la toundra au détriment de la forêt, et les espèces animales associées prolifèrent sur une Europe où règne un climat en moyenne plus sec, plus froid, avec une moindre amplitude saisonnière.
Deux choses sont à noter: une glaciation est favorisé par une élévation soudaine de la température (ça ne vous rappelle rien?), et la phase glaciaire est beaucoup plus stable que la phase de réchauffement (les interstades ou périodes de réchauffement ne sont que des épisodes courts entre les glaciations)... Or une glaciation, c'est un rétrécissement considérable de l'espace viable our l'homme sur la Terre, le problème c'est que nous nous sommes bien étalés sur nos continents à nous...
Erika, ki remercie Joseph Reichholf et le Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement (CEA) pour toutes ces informations.
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***[i]Le seul moyen de se débarrasser d'une tentation, c'est d'y succomber! OW[/i]***